Chantefable
Incrustée dans son quartier Gambetta comme une patelle sur son rocher, cette brasserie centenaire est une grande claque populaire, familière, amicale, chaleureuse, propre à illustrer ce « Paris aux 100 villages » selon une accroche consacrée. Mieux, après une avant-scène-terrasse anodine, on débarque un peu halluciné dans un cadre début de siècle restauré (les années 1900-1920), fait de moulures au plafond, de grands miroirs, d'un comptoir en comblanchien, l'ensemble dans des tonalités tabac blond (qui devait être celui de la nicotine avant l'interdiction de cloper), où s'alignent en profondeur de champ des tables aux nappes vichy et banquette moleskine. Étonnant d'autant qu'ici on doit flirter, au bas mot, avec les 150 couverts. Pour parfaire le tableau, le personnel, qui s'affiche en gilet noir et tablier blanc, connaît son petit monde d'habitués sur le bout de la fourchette (on vous passe l'inventaire, du retraité au couple avec bambins et poussette), les choyant du mieux qu'ils peuvent. On se doute bien que, pour être en phase avec cet esprit brasserie de toujours, la carte ne se vautre pas dans le yuzu, le chipotle, la carbonara ou le quinoa. Alors on cause os à moëlle, terrine maison, harengs pommes à l'huile, gratinée, œufs meurette, huîtres Gillardeau, épaule d'agneau confite, bœuf en morceaux choisis (filet, côte, entrecôte...), parmentier de canard confit, sole belle meunière, mousse au chocolat et millefeuille. De l'anti-prises de tête à laquelle on succombe d'aise, comme nous, avec notre déroulé « bad trip cholestérol », œufs durs bio mayo, filet de rumsteck (200 grammes au bas mot) sauce poivre et délicieuses frites maison, profiteroles au chocolat et glace vanille (hélas industrielle). Et dont on sort repu et heureux d'avoir partagé une tranche de vie quelque peu inhabituelle. Gilles Dupuis
Œufs durs mayo bio- Flet de rumsteck sauce poivre et frites maison - Profiteroles au chocolat.